Le Code du travail menacé de démantèlement !
1. La durée maximale de travail pendant une journée reste fixée à dix heures, mais par accord d’entreprise, peut passer à douze heures « en cas d’activité accrue ou pour des motifs liés à l’organisation de l’entreprise »
2. La durée maximale de travail pendant une semaine est fixée à quarante-huit heures mais les services du ministère du travail peuvent, ponctuellement, élever ce plafond à soixante heures, en cas de « circonstances exceptionnelles et pour la durée de celles-ci ». En outre, les salariés peuvent, si un accord collectif le prévoit, être amenés à travailler quarante-six heures par semaine, au maximum, pendant seize semaines. Et voir leur temps minimal de repos quotidien provisoirement réduit.
3. Les entreprises de moins de cinquante personnes pourront, même en l’absence d’un accord collectif, proposer à leurs salariés de passer au forfait jour (c’est-à-dire un minimum de 217 jours travaillés par an sans limitation de la durée quotidienne autre que les 11 h de repos quotidienne soit un maximum de 13 heures de travail par jour.
4. Un nouveau régime pour les heures supplémentaires : La majoration de toute heure travaillée au-delà de 35 heures pourra être portée, par accord d’entreprise, à 10 % au lieu de 25 % aujourd’hui. En l’absence d’accord, la majoration est de 25 % pour les huit premières heures supplémentaires, 50 % ensuite.
5. Indemnités prud’homales plafonnées. Les indemnités compensatrices décidées par les prud’hommes en faveur des travailleurs du privé victimes d’un licenciement abusif seront plafonnés en vertu d’un barème fondé sur l’ancienneté. [1]
En cas de licenciement sans «cause réelle ni sérieuse » le barème serait le suivant
Ancienneté dans l’entreprise |
Mondant de l’indemnité |
Moins de 2 ans |
3 mois de salaire |
De 2 ans à 5 ans |
6 mois de salaire |
De 5 à 10 ans |
9 mois de salaire |
De 10 à 20 ans |
12 mois de salaire |
Au-delà de 20 ans |
15 mois de salaire |
6. Licenciements économiques : Multiplication des motifs « économiques » autorisant le patronat à licencier. Ainsi: « une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires pendant plusieurs trimestres consécutifs », « pertes d’exploitation pendant plusieurs mois », «importante dégradation de la trésorerie » s’ajouteront aux « motifs » déjà accordés ces dernières années, « mutations technologiques » ou « réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ». Un accord de branche peut fixer la durée de la baisse de commandes ou du chiffre d’affaires, ou la durée des pertes d’exploitation (au moins un trimestre). A défaut d’accord, ces durées sont respectivement fixées à quatre trimestres consécutifs et un semestre.
7. Un employeur pourra, par accord d’entreprise, modifier les horaires de travail, augmenter la durée de travail et diminuer les salaires en cas de « difficultés de l’emploi »(accord dit défensif) et en cas d’embauche (accord dit offensif) si l’employeur déclare ces mesures nécessaires à « la conquête de marchés» Si un salarié refuse ces modifications, il pourra être licencié « pour motif personnel»
8. Tout accord d’entreprise sera validé s’il est contresigné, c’est-à-dire, approuvé par des syndicats ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés lors des élections professionnelles. MAIS si les signataires représentent moins de 50 % et plus de 30 % des suffrages exprimés, l’employeur pourra faire valider cet accord par REFERENDUM. En effet si le oui l’emporte, l’accord entrera en vigueur et les syndicats ayant obtenu une majorité de suffrages ne pourront pas faire jouer leur droit d’opposition.
9. Des droits sociaux tout au long de la carrière. Le texte donne un contenu au compte personnel d’activité. Ce dispositif, qui intègre le compte personnel de formation et le compte pénibilité, permettra à tous les actifs, quel que soit leur statut, de conserver leurs droits sociaux tout au long de leur vie professionnelle. Commentaires de l’IESE : Mais de quels droits s’agit-il ? Après ce projet et tous les autres du gouvernement Hollande qui prolongent et aggravent les lois de Sarkozy, que restent-ils ?
Rappel – Rappel – Rappel - Conquis il y a 150 ans – Rappel - Rappel – Rappel - le Code du Travail, comme les conventions collectives, est valable et s’applique sur tout le territoire national, dans toutes les entreprises, et bénéficie à tous les salariés. Le Code du travail a pour objectif de compenser socialement le rapport de subordination économique du salarié à son employeur.
10. Si par malheur, ce nouveau projet de loi, énième projet de déréglementation et de flexibilité depuis le tournant de la rigueur de 1982/83, était adopté, alors le Medef pourrait faire exploser le Code du travail, déjà largement amoindri. Comment ?
1) En mettant en avant des difficultés économiques, quelles qu’elles soient, tout employeur pourra éviter l’application du code du travail actuel et modifier tout ou partie des éléments constitutifs du contrat de travail et même licencier !! (Voir ci-dessus les points 1, 2, 3, 4, 6, 7) En cas de contestation par un salarié du motif de ces licenciements dits « économiques », l’employeur saura par avance combien cela lui coûtera d’abuser du motif de licenciement par le jeu du barème du montant des indemnités compensatrices fixées, par les prud’hommes (Point 5).
2) La liste des motifs économiques que l’employeur pourra invoquer ne comporte aucune référence aux bénéfices. Ceux-ci pourront atteindre des sommets, l’employeur pourra licencier, baisser les salaires, changer les horaires… Ces critères économiques font seulement référence au chiffre d’affaires et à la trésorerie (point 6).
3) Pour empêcher l’application dans son entreprise du Code du travail ou des conventions collectives le patronat mettra en place un accord d’entreprise dérogatoire au Code du Travail et aux conventions collectives même si les organisations syndicales non signataires représentant 70% du personnel refusent cet accord.
11. Ajoutons parmi toutes ces mesures :
- Les apprentis pourront travailler 10 h par jour et 40 heures par semaine
- La durée du congé pour décès d’un membre de sa famille n’est plus garantie par la loi
12. En conclusion ce projet de loi vise à permettre le dynamitage complet du Code du travail et des conventions collectives, les premiers bénéficiaires en sont une fois de plus les grands groupes patronaux, les multinationales qui, de plus, en tant que donneurs d'ordre, rendraient les conditions de travail féroces dans les petites entreprises/sous-traitantes. Si un coup d’arrêt n’était pas donné maintenant à cette politique de baisse du coût du travail exigée par le capital financier, ce nouveau projet entraînerait la disparition des acquis de 1936 et 1945, et rétablirait les conditions d'exploitation de nos ancêtres. Malgré le bilan désastreux [2] pour les salariés et la population de ces plus de 40 ans d’aides aux employeurs et aux marchés financiers et aux actionnaires, malgré le rejet par l’immense majorité du pays de sa politique, le gouvernement Hollande, à la suite des gouvernements précédents ose persévérer. A la demande du MEDEF et des multinationales, ils ont même menacés d’imposer ce projet par force avec l’article 49.3 comme pour la loi Macron. Nous pouvons et nous devons les faire renoncer à ce projet désastreux.
Pour le monde du travail, il est légitime et nécessaire de dire :
- Bas les pattes devant le Code du travail et nos conventions collectives
- Retrait immédiat de ce projet de loi
[1] Toutefois, le juge pourra octroyer des sommes plus élevées que celles de la grille dans l’hypothèse où le patron a commis une faute d’une « particulière gravité » « harcèlement moral ou sexuel », « licenciement discriminatoire »...
[2] Les mesures prises ces 40 dernières années, en faisant basculer les risques économiques du côté des salariés, ont eu, notamment, les conséquences dramatiques suivantes : Chômage massif avec pour la seule année 2015, une augmentation du nombre de chômeurs inscrits à Pôle emploi de 259 700 pour atteindre un total de 5,77 millions d’hommes et de femmes privés d’emploi licenciements par milliers et milliers, effondrement des salaires ouvriers et employés, blocage du SMIC, horaires de travail répartis sur les 24 heures, disparition de l’horaire normal de journée, explosion de la précarité et de la pauvreté, y compris dans les familles dont les adultes ont un travail, dégradations des conditions de travail telles que les cas de suicides au travail se sont multipliés. Conjointement les droits syndicaux sont systématiquement revus à la baisse !
Pendant ce temps, les entreprises ont bénéficié en 2015 de 23 milliards d’euros de crédit d’impôts et d’allègement de cotisations sociales, en 2016 et 2017 le montant de ces aides directes aux employeurs sera respectivement de 32 milliards et 41milliards. Quant aux bénéfices réalisées par les 40 premières entreprises (le CAC40), leur total a progressé de 20 % en 2015 le portant à 78 milliards d’€.